Du mythe de l’autorité naturelle
Du mythe de l’autorité naturelle à l’autorité éducative de l’enseignant :
des savoirs à construire entre représentation et action
Bruno Robbes (2007)
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INTRODUCTION ET HYPOTHESES
De la discipline scolaire à l’autorité de l’enseignant, par la pédagogie institutionnelle
Il est peut-être des enseignants auxquels la discipline et l’autorité en classe ne poseraient pas de problèmes : ce ne fut pas mon cas. Aux fondements de ma réflexion, ce « coup de pied aux fesses » adressé à une élève de CM2 lors d’un stage, alors qu’âgé de dix-neuf ans, j’étais encore élève instituteur. Irruption d’une violence fondamentale inscrite en soi (Hellbrunn & Pain, 1986, p. 13) qui vient contrecarrer un métier idéalisé, mais aussi violence fondatrice d’une mise en question : suis-je fait pour ce métier ? C’est alors qu’à l’Ecole normale, je rencontre Jacques Pain et la pédagogie institutionnelle :
« changer de métier ou changer le métier » disait Fernand Oury. Un chemin s’ouvre… Je m’engage dans un processus de (trans-)formation : groupe des Marleines (Pain, 1994), stages de pédagogie institutionnelle, démarrage d’un cursus en Sciences de l’éducation.
Nommé instituteur à Garges-lès-Gonesse, j’y exerce pendant treize années, dont cinq comme maître formateur et une comme directeur d’école. J’apprends mon métier, en cherchant dans la pratique des techniques Freinet et de la pédagogie institutionnelle, des solutions utilisables pour résoudre mes problèmes de discipline scolaire. C’est ainsi qu’en 1992, je soutiens une maîtrise de Sciences de l’éducation (Robbes, 1992).
Mes pratiques de maître formateur puis de directeur d’école m’amènent à constater que chez
l’enseignant débutant, la formation initiale n’évite pas la persistance de modélisations pédagogiques liées à son vécu, heureux ou malheureux, d’élève. Souvent, il pratique la classe en tentant d’imiter ses maîtres. Surviennent alors des réussites, mais aussi des difficultés que les souvenirs d’élève ne suffisent pas à résoudre. De multiples questionnements surgissent : le cours magistral, les méthodes pédagogiques traditionnelles sont-elles les seules manières d’enseigner ? L’enfant qui apprend est-il passif ou actif ?
Comment faire travailler ensemble des élèves de niveaux différents ? Comment faire avec les élèves en difficulté ? Comment gérer une classe, avec ses phénomènes de groupe qui nous dépassent, les tentatives de certains élèves cherchant à nous entraîner dans des relations de séduction ou d’agression ? Comment faire avec les problèmes de discipline ? Peut-on donner la parole aux élèves sans provoquer immédiatement des situations ingérables ? Qu’est-ce qui peut être discuté ? Qu’est-ce qui est de la responsabilité du maître ? Comment gérer les conflits ? Faut-il sanctionner ? Qu’est-ce qui agit dans la classe, le maître ou le dispositif ? Qu’est-ce que l’autorité ? D’où vient-elle ? Le maître doit-il faire preuve d’autorité ?… Devant cette complexité, l’enseignant et le formateur sont très souvent démunis.........
J’en vins ainsi à considérer que malgré la pertinence des dispositifs pédagogiques qu’un
enseignant peut mettre en place dans sa classe, un aspect irréductible du métier relevait de ce que je nommais la « personne », de préférence aux termes « personnalité » ou « sujet » plus connotées. La question de l’autorité venait révéler cette évidence que l’enseignant est une personne (Abraham, 1984), ce que je considère comme un premier postulat.
Postulat 1 : malgré la pertinence des dispositifs pédagogiques qu’un enseignant peut mettre en place dans sa classe (pédagogie coopérative, institutionnelle ou autre), dans la question de l’autorité, une part irréductible du phénomène relève de la dimension personnelle.
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Présentée et soutenue par Bruno Robbes le 2 juillet 2007.
Jury: Jacques PAIN, Mireille Cifali, Françoise Cros, Philippe Meiirieu, Jean-Pierre Pourtois.
Cette thèse a obtenue en 2010 le prix Charles Cros
de l’Académie des Sciences Morales et Politiques