L’École de Monticello: des nouvelles
Cher ami,
Je t’envoie en pièces jointes des photos de quelques aménagements de la nouvelle école primaire de MONTICELLO :
** l’un des “coins lecture” de la bibliothèque-médiathèque, conçue pour que les enfants aient envie de s’y rendre librement et de choisir un livre, un périodique, une bande dessinée... qu’ils souhaitent lire en toute détente corporelle, seuls ou en compagnie d’un ou de plusieurs pairs, dans le cadre du projet pédagogique du Maître (de la Maîtresse) ou non. Pour les autres aménagements, voir le descriptif ;
** les structures semi-circulaires avec “gradins” installées dans chaque classe de l’école maternelle. Elles sont conçues pour que le Maître ou la Maîtresse puisse faciliter et développer la communication et les échanges avec les enfants regroupés sous son regard, et entre eux, en ayant la possibilité d’illustrer son propos au moyen d’images données par l’outil audiovisuel fixé à une certaine hauteur (projecteur, ordinateur...) ;
** l’une des superstructures de la cour de récréation de l‘école maternelle. La plupart des “mobiliers” et aménagements ne sont pas encore en place car nous avons dû les faire fabriquer en raison de leur nouveauté (ils n’existent pas dans le commerce). Il en est de même pour la cour de l’école élémentaire à droite. En arrière-plan, se trouve “l’aile” de la “partie haute” de l’école, avec à gauche le bureau de la directrice puis, au milieu, avec son chapeau jaune, la salle de psychomotricité conçue pour toutes les classes d’âges (la hauteur est de 5 mètres), la salle des RASED et, à droite, la bibliothèque-médiathèque. Cette “aile” est perpendiculaire à “l’aile” constituée par l’école maternelle (à gauche) et à “l’aile” formée par l’école élémentaire (à droite) ;
** installée sur le “parvis” de l’école, la volière abritera deux couples “permanents” de tourterelles à la fin de l’hiver. En arrière-plan, en blanc, insérée dans le sol, une enceinte rectangulaire de conversation dans l’attente de l’ouverture de l’école (on y accède par quelques marches, et on peut s’asseoir sur le rebord) et, en arrière-plan, le mur qui délimite de l’autre côté un couloir avec une faible pente pour que les personnes en fauteuil et les autres personnes handicapées puissent accéder facilement à l’école.
La “sphère d’accueil”, les classes, les cours de récréation... (voir le descriptif) “se meublent” progressivement, conformément à ce que nous avons prévu. Les enfants et les parents sont ravis. En revanche, trois enseignants traînent les pieds (la peur de l’innovation ... l’un des handicaps de la FRANCE!).
Finalement, l’école sera inaugurée au printemps 2013... en présence du Ministre Vincent PEiLLON (initialement, c’est François HOLLANDE qui avait souhaité être invité à l’inauguration).
Je suis évidemment de près, en tout cas autant que je puisse le faire (je ne fais pas partie du sérail), les péripéties et obstacles qui jalonnent l’élaboration du projet “Refondons l’école de la République”. Il serait tellement important qu’il soit couronné de succès, même s’il doit encore être précisé, amendé, approfondi et complété, et s’il reste donc très insuffisant. Je passe beaucoup de temps à expliquer que, sans aucun doute, l’école doit être réellement refondée pour permettre à chaque enfant de se réaliser à la fois dans ses dimensions d’enfant (surtout quand le milieu familial est fragile, démuni, maltraitant, désespéré, anxiogène...) et dans ses dimensions d’élève. Pour des raisons sociales, humanistes et de santé publique, mais aussi économiques et politiques. Peut-on en effet construire une société apaisée, généreuse, altruiste, viable, robuste, prospère... et assurer un avenir serein à la nation, en tout cas sans inquiétude majeure, lorsqu’un nombre croissant d’enfants sont en difficulté dans leur famille, à l’école et/ou dans le tissu social ? Malheureusement, beaucoup de personnes ne sont pas conscientes que l’école de la France va mal.
Je déplore que le Ministre de l’Education Nationale, Monsieur Vincent PEILLON, ne soit pas mieux informé, plus lucide, plus cohérent (il est pourtant professeur de philosophie !), et qu’il soit prisonnier des clichés et dogmes véhiculés par une administration archaïque... toujours aux commandes, et par des collaborateurs et petits marquis du PS qui ne connaissent que les élèves (quand ils les connaissent !), et non pas “également” l’enfant qui “se cache” derrière l’élève, à l’exception de quelques-uns... qui n’ont pas “voix au chapitre”. La plupart des administratifs, collaborateurs et et conseillers du Ministre ne laissent en effet aucune place à l’enfant qui “fonde” et “sous-tend” “l’élève” (au Ministère, j’ai souvent eu l’impression de proférer une obscénité ou d’être un individu exotique quand je parlais de l’enfant). En d’autres termes, ils ignorent, sous-estiment ou ne considèrent pas sérieusement les difficultés personnelles, familiales, scolaires, sociales et/ou culturelles qui peuvent empêcher un enfant de libérer ses processus cognitifs, de mobiliser ses ressources intellectuelles et de pouvoir entrer dans les apprentissages scolaires. Ou même, d’avoir envie d’apprendre (la pédagogie la mieux maîtrisée et la plus talentueuse ne peut être efficiente que si les écoliers sont ouverts et réceptifs, ou ont envie de l’être, en d’autres termes, s’ils vivent au quotidien dans la sécurité affective, la confiance en soi et dans autrui). En outre, peu convaincants et peu combatifs, la plupart des collaborateurs du Ministre sont réducteurs. Par exemple, s’ils mettent l’accent sur les “décrocheurs” au collège, ils “oublient” qu’il faudrait aussi se préoccuper des “non accrocheurs” dès l’école maternelle. J’y ai vu de nombreux enfants s’enfermer dans l’échec parce que, au quotidien dans leur classe, ils ne pouvaient pas, ne savaient pas ou ne voulaient pas être réceptifs et disponibles, focaliser leur attention, et mobiliser leurs ressources intellectuelles pour comprendre le sens et la signification des messages du Maître. Ces enfants qui ne parviennent pas à entrer dans les savoirs et les connaissances, ne peuvent “s’accrocher” aux situations d’apprentissage (selon le LAROUSSE, s’accrocher, c’est “se cramponner avec force, être tenace, persévérer”).
En outre, malgré sa détermination affichée et quelque peu démagogique, le Ministre peine à contenir et “désarmer” les deux principaux groupes de pression conservateurs et archaïques, incapables de reconnaître et d’assurer aux enfants la place majeure qui leur revient dans la société : une partie non négligeable des Maires gestionnaires et les deux syndicats majoritaires des enseignants dans le premier degré (le SNUipp et le SE) auxquels il faut ajouter le pire... FO.
Je crains donc que la “Refondation de l’école” ne soit un leurre, une imposture et une mystification, voire une bouffonnerie à certains égards. D’ailleurs, la concertation “Refondons l’école de la république” fut une mascarade. J’ai joué le jeu... sans illusion. Nous sommes toujours gouvernés par des conservateurs suffisants, centrés sur eux-mêmes, imbus de leur personne, parfaitement égoïstes et déshumanisés, même s‘ils se disent ou se croient socialistes. Les syndicats enseignants illustrent bien cette réalité funeste : les syndicats majoritaires, le SNUipp et le SE, ainsi que FO, sont réactionnaires au vrai sens du terme. Au fond, ils considèrent les enfants comme des choses qu’ils utilisent cyniquement sur l’échiquier de leurs intérêts personnels et/ou familiaux. Ils ont pris les enfants en otage. En outre, j’ai pris conscience qu’ils ont une culture bibliographique très limitée et qu’ils sont incroyablement limités dans leurs analyses et propositions. Ce qui n’arrange rien.........
Amitiés
Hubert Montagner
Des nouvelles de Monticello
jeudi 3 janvier 2013
Hubert MONTAGNER,
Dr. ès-Sciences, Professeur des Universités en retraite, ancien Directeur de Recherche à l’INSERM, ancien Directeur de l’Unité « Enfance Inadaptée »
de l’INSERM